Premier SUV de la marque britannique, le Bentley Bentayga s’attaque à un marché encore peu concurrentiel dans le secteur des marques prestigieuses. Est-il cependant à la hauteur des attentes des clients les plus exigeants ? C’est ce à quoi nous allons essayer de répondre dans cet essai.
Un SUV Bentley ? Diesel qui plus est ? À priori, sur le papier, cela ne fait pas autant rêver qu’une Continental GT. Mais force est de constater que la proposition est intéressante, et même si elle détonne par rapport à la politique adoptée par la marque, le Bentley Bentayga en version diesel devrait permettre au constructeur de grappiller encore quelques parts de marché, notamment au niveau des – grosses – entreprises pour qui, comme vous le savez à l’heure où nous écrivons ces lignes, le diesel est encore plus avantageux fiscalement que l’essence malgré tous les récents scandales liés à cette énergie.
Bentley profite de son appartenance au Groupe Volkswagen pour piocher dans le catalogue des moteurs du groupe, parmi lequel se trouve un V8 Diesel bi-turbo de 4,0 litres de cylindrée, que l’on retrouve notamment au sein de la nouvelle Audi SQ7 (retrouvez notre essai de l’Audi SQ7). Qu’à cela ne tienne, celui-ci devrait faire l’affaire, d’autant plus qu’il développe une puissance plutôt correcte avec 435 chevaux et 900 Nm de couple, disponibles dès 1000 tr/min. Mais est-ce suffisant pour tracter convenablement les 2,5 tonnes de l’engin ? Réponse ci-dessous.
Essai Bentley Bentayga Diesel : premières impressions
Pour contextualiser, le Bentayga est le fruit du travail réalisé sur le concept-car Bentley EXP 9 F, dévoilé il y a maintenant plus de cinq ans au Salon de Genève 2012. Un concept-car qui était loin de faire l’unanimité, mais quoi qu’il en soit, les réalités du marché sont là. Aujourd’hui, pratiquement un tiers des voitures neuves vendues sont des SUV. Et les marques prestigieuses ne peuvent se permettre de mettre de côté une telle source potentielle de revenus supplémentaires. Certaines marques justifient leur non présence sur le marché du SUV par rapport à leur historique et à leur philosophie, c’est un choix. En attendant, Aston Martin, Lamborghini et plus anciennement Porsche vont, ou ont franchi le pas.
Il reste quelques irréductibles, comme Ferrari ou McLaren, bien que Ferrari, visiblement, compte bien détourner le concept du SUV pour offrir une alternative, mais à leur manière. Quant à Bentley, le constructeur ne s’est pas vraiment caché. Ils veulent sortir un SUV, ils ont sorti un SUV : un vrai, un mastodonte, même s’il rompt avec l’élégance et le raffinement habituel des Bentley. Pourtant, il en adopte tous les codes. Les doubles optiques à l’avant, une calandre béante, quelques chromes discrets… Malheureusement, à nos yeux, la recette ne prend pas vraiment. Il donne l’impression de faire bien trop massif, et il l’est, à vrai dire. Rappelons ses dimensions : 5,14 mètres de long, 2 mètres de large, et 1,74 mètres de haut. C’est plus large et plus long qu’une Audi SQ7, et tout aussi haut. Pourtant, la recette a l’air de mieux fonctionner sur l’Audi.
Difficile de dire pourquoi, une affaire de goût sûrement, mais peu de monde s’accorde à dire qu’il s’agit d’une « belle » voiture à proprement parler. Un SUV est-il beau de toute façon ? C’est encore une question de goût. Nous, nous voyons avant tout le SUV comme quelque chose de pratique, et le Bentayga l’est, plus que n’importe quelle Bentley. Le contrat est-il donc rempli dans ce cas ? Quoi qu’il en soit, même si son style détonne, il conserve néanmoins tous l’attrait des Bentley d’aujourd’hui : c’est-à-dire des assemblages de carrosserie impeccables et des finitions au plus haut niveau, bref, nous sommes bien en face d’une Bentley. Une Bentley différente, mais une vraie Bentley.
Essai Bentley Bentayga Diesel : vie à bord
À l’intérieur, nous avons envie de vous dire que nous sommes bien dans une Bentley, certes, mais dans une « nouvelle » Bentley. Ici, nous retrouvons des technologies embarquées qui ne sont malheureusement plus de la première jeunesse (sans être désuètes non plus). Pourquoi ne pas avoir pioché chez Audi dans ce cas ? Au sein du Bentayga, pas d’instrumentation 100% numérique : nous retrouvons des compte-tours physiques classiques, l’écran de navigation est pour le coup un peu obsolète, les graphismes ne sont pas les plus beaux et l’ergonomie loin d’être la meilleure. Bref, nous aurions aimé quelque chose de plus contemporain.
En dehors de ça, notre version d’essai est affublée d’un accastillage un peu particulier, où le cuir recouvre pratiquement tout l’habitacle. Le mélange est réussi entre cuir blanc « Portland » et cuir rouge « Fireglow », le tout, souligné par un bandeau de planche de bord en bois vernis « Dark Fiddleback Eucalyptus ». Ajoutez à cela de nombreux inserts en chrome ou en aluminium, et l’ensemble est tout simplement superbe. Petit point noir en revanche concernant certains assemblages, notamment au niveau de la console centrale, avec du jeu sur certaines commandes. Étonnant pour une voiture du Groupe Volkswagen, encore plus quand il s’agit de la plus prestigieuse. C’était peut-être un défaut isolé de notre version d’essai, cela dit.
À l’arrière, les passagers n’auront peut-être pas l’espace le plus généreux, mais Bentley a su compenser avec un lot d’équipements de standing. Les passagers auront le droit à leur petite console centrale avec tablette intégrée, ainsi que un petit logement pour y intégrer une flûte de champagne. Tout cela s’accompagne de deux écrans multimédia, tactiles et connectés. Enfin, grâce à un pack d’options facturé 8675 euros, notre modèle d’essai dispose de deux sièges indépendants, réglables électriquement, chauffants et massants : royal. Moins royal, le volume du coffre n’affiche que 431 litres, soit seulement 11 litres de plus qu’une Peugeot 308 à titre d’exemple.
Bentley offre bien entendu la possibilité de personnaliser son Bentayga à souhait, grâce à la présence au catalogue des options de six essences de bois différentes, et une septième légèrement jaunie, absolument superbe, pour un intérieur encore plus contemporain. Les choix concernant le cuir sont encore plus importants, avec pas moins de 12 teintes de cuir différentes. La configuration d’une telle voiture donne le vertige.
Essai Bentley Bentayga Diesel : sur la route
Sous le capot, nous retrouvons un bloc V8 diesel bi-turbo associé à un compresseur électrique (fourni par Valeo) qui développe une puissance de 435 chevaux et 900 Nm de couple. Précisons que le compresseur joue un rôle assez important puisqu’il apporte un supplément de 200 Nm, dès les plus bas régimes, à l’accélération. Il s’agit tout simplement des mêmes valeurs et le même moteur que l’Audi SQ7. Ce bloc est bien moins puissant que le W12 essence du Bentayga le plus onéreux développant 608 chevaux, mais celui-ci propose la même valeur de couple. Ce moteur s’est avéré très discret à bas régime grâce à une insonorisation remarquable. Il en montre un peu plus haut dans les tours en distillant une sonorité pas si désagréable pour un diesel.
Le double turbo à géométrie variable et le compresseur électrique (alimenté par une batterie lithium-ion de 48V) permettent d’obtenir les 900 Nm dès 1000 tr/min. De quoi garantir des performances plus que convenables. Bentley annonce un 0 à 100 km/h effectué en 4,8 secondes. Dans la réalité, et selon nos mesures, il faut bien rajouter une seconde, mais cela reste toutefois plus que correct. Il faut dire que le moteur doit tout de même tracter plus de 2,5 tonnes. La puissance est transmise aux quatre roues motrices via une boîte automatique à convertisseur TipTronic à huit rapports. C’est sûrement aujourd’hui la seule boîte qui peut supporter autant de couple.
Concrètement, le Bentley Bentayga Diesel n’est pas là pour faire de la compétition automobile, sa philosophie est ailleurs. Le bon rythme pour rouler en Bentayga ? Celui d’un sénateur tout simplement. Et ça, il sait le faire, et avec un confort de conduite absolument remarquable. Les suspensions filtrent absolument toutes les aspérités de la route, l’amortissement piloté, même en mode « Sport », est d’une douceur remarquable. C’est bien simple, à l’arrière, nous nous sommes cru au sein d’une Citroën DS et ses fameuses suspensions hydrauliques. Attention néanmoins lorsqu’on élève le rythme, où le dit « malaise Citroën » revient vite si l’estomac n’est pas bien accroché.
Sur routes sinueuses, bien entendu, ce n’est pas vraiment le véhicule adéquat. En raison de son centre gravité élevé et de ses 2,5 tonnes, l’ensemble tire la voiture vers l’extérieur des virages. La voiture s’affaisse sur chaque appui, ne comptez pas non plus lui faire encaisser une double charge à allure soutenue, elle ne saura plus où donner de la tête. Le Bentley Bentayga Diesel est une voiture faite pour les grands axes et pour les long voyages. À raison d’une consommation mixte relevée autour de 13,0 l/100 km, nous pouvons aisément descendre sous la barre des 10 l/100 km sur autoroute. Avec ses 85 litres de réservoir, le calcul est rapidement fait : le Bentayga Diesel peut pratiquement avaler 900 kilomètres sans s’arrêter à une station-service.
Si 99% de ses clients ne s’aventureront jamais en dehors des sentiers battus avec leur Bentayga, sachez qu’il est tout de même taillé pour cela, notamment avec sa suspension à hauteur variable. Bien entendu, il ne sera pas aussi bon qu’un Jeep Wrangler (retrouvez notre essai du Jeep Wrangler) ou qu’un Land Rover Defender, mais saura sans doute passer là où bon nombre d’autres SUV ne passeront pas. Sa seule limite ? Ses pneumatiques de 21 pouces pas vraiment à l’aise en dehors de l’asphalte. Précisons que le Bentayga est équipé d’une transmission intégrale permanente, avec un essieu arrière pourvu d’un différentiel à blocage électronique. Suivant les programmes de conduite, sa hauteur de caisse peut varier de 20 à 25 millimètres, et s’abaisser de 75 millimètres sur autoroute afin de favoriser l’aérodynamisme. Il s’agit en outre des mêmes technologies que l’Audi SQ7, avec un cahier des charges différent et une suspension clairement orientée confort. Il en va de même pour les barres anti-roulis activées électriquement par la petite batterie de 48V (qui alimente également le compresseur). Celles-ci minimisent la prise de roulis en courbe et diminuent les mouvements de caisse. Cependant, ces caractéristiques sont bien moins marquées que sur le SUV allemand.
Côté freinage, nous ne pouvons malheureusement pas défier les lois de la physique. Bien que correctement dimensionnés (400 mm à l’avant et 350 mm à l’arrière), les freins doivent très certainement souffrir le martyr afin de stopper les 2,5 tonnes de notre monture. Mais globalement, le Bentayga est plutôt bien tenu en frein pour son gabarit, surtout pour l’usage réel que l’on devrait en avoir. Concernant la direction, celle-ci s’est révélée un poil collante à rythme normal, mais gagne en consistance et devient par la même occasion plus naturelle une fois le mode « Sport » enclenché.
Essai Bentley Bentayga Diesel : en bref
Sur le papier, nous devons vous avouer qu’une Bentley carburant au diesel ne nous enthousiasmait guère. Fort heureusement, la firme de Crewe bénéficie d’un appui technologique de taille : celui du Groupe Volkswagen. Et avouons le, aujourd’hui, le bloc 4.0 V8 Diesel bi-turbo du groupe est très certainement l’un, si ce n’est le diesel le plus agréable du marché, et nous ne parlons pas seulement des performances. Celui-ci offre, certes, des performances sans égal, mais permet également d’offrir à son conducteur un agrément de conduite assez spectaculaire, sans aucune vibration, compte-tenu du poids de la voiture.
Il s’agit aussi de la moins onéreuse des Bentley, affichée sous la barre des 150.000 euros : Bentley vise clairement un autre type de clientèle et vient directement marcher sur les plates-bandes de Land Rover et de son Range Rover. En revanche, du côté des options, l’addition risque de vite grimper, aussi vite que sur notre version d’essai où la liste des options s’affiche à pratiquement 75.000 euros. Est-ce le prix de l’exclusivité ? Sûrement. Mais à ce prix, l’exclusivité ne peut-elle pas se traduire purement et simplement par l’achat d’une version W12 ? Après tout, un moteur noble dans un voiture noble, quoi de plus logique ?
Essai Bentley Bentayga V8 Diesel 435 : Fiche Technique
- Moteur : Diesel, 8 cylindres en V, 3956 cm³, 32 soupapes
- Position : Longitudinale
- Suralimentation : Injection directe à rampe commune, compresseur et 2 Turbos
- Puissance : 435 ch DIN (320 kW) à 3.750 tr/min
- Puissance fiscale : 32 CV
- Couple moteur : 900 Nm à 1.000 tr/min
- 0 à 100 km/h : 4,8 secondes
- 0 à 200 km/h : 20,6 secondes
- Vitesse maxi : 270 km/h
- 80 à 120 km/h : 3,8 secondes
- 400 mètres départ-arrêté : 13,8 secondes
- 1.000 mètres départ-arrêté : 25 secondes
- Transmission : Intégrale
- Boite de vitesses : Boîte automatique Tiptronic à 8 rapports
- Pneus : 285/45 ZR 21
- Freins AV : Disques ventilés (400 mm)
- Freins AR : Disques ventilés (350 mm)
- Longueur : 5.140 mm
- Largeur : 2.000 mm
- Hauteur : 1.740 mm
- Empattement : 3.000 mm
- Volume de coffre : 431 à 1774 litres
- Poids à vide : 2.499 kg
- Rapport Poids/Puissance : 6,4 kg/ch
- Consommation Urbaine : 9,0 l/100 km
- Consommation Extra-Urbaine : 7,4 l/100 km
- Consommation Mixte : 7,9 l/100 km
- Capacité Réservoir : 85 litres
- Emissions de CO2 : 210 g/km (Malus : +10.000 €)
- Norme antipollution : Euro 6
- Année de lancement : 2016
- Prix de base : 146.500 €
- Prix du modèle essayé : 221.135 €